L’investissement locatif en immobilier commercial a historiquement des rendements locatifs élevés mais il faut bien comprendre que les risques qui l’accompagnent sont aussi proportionnellement plus grands que pour un local d’habitation.
Nous allons vous détailler dans cette fiche les risques principaux par ordre d’importance décroissant : surévaluation du loyer, départ du preneur, travaux immobiliers d’investissement à prévoir.
SOMMAIRE
Surévaluation du loyer
Quand vous achetez des murs de locaux commerciaux, vous achetez la plupart du temps le loyer d’un bail en cours consenti à un locataire appelé preneur.
Un local commercial acheté 400 000€ avec un loyer annuel hors charges de 30 000€ vous rapporte théoriquement un rendement brut de 7,5%.
Pour obtenir le rendement net vous devez théoriquement déduire du loyer les dépenses opérationnelles courantes (OPEX) que vous devez engager régulièrement.
C’est à cette étape que vous devez vous pencher sur la clause de charges du bail commercial dont vous allez hériter. En effet certains baux prévoient une prise en charge quasi-complète des charges par le preneur (qui peut payer par exemple la taxe foncière et la plupart des contrats d’assurances de l’immeuble ou encore les honoraires du syndic).
D’autres baux prévoient qu’une partie significative des charges restent payées par le bailleur, donc vérifiez bien le bail.
Cette détermination du niveau de charges est importante car c’est une composante du loyer charges comprises que le preneur va payer. Or le point crucial dans l’évaluation du rendement brut est le niveau général du loyer chargé que le preneur paie par rapport 1) au marché de sa zone 2) à son taux d’effort (rapport entre loyer charges comprises et chiffres d’affaires).
Déterminer si le loyer est surévalué est crucial, car il vous permet de quantifier le risque que le preneur décide de résilier le bail pour prendre :
- un local équivalent moins cher s’il réussit à le trouver à commercialité équivalente dans la zone
- un local moins grand ou moins bien placé et donc moins cher si son activité est trop faible pour tenir
Le deuxième cas est moins grave : si le loyer est au marché mais que le preneur part à cause d’un taux d’effort trop élevé, vous pouvez espérer relouer le local rapidement à la même valeur. Vous allez néanmoins subir de la vacance locative et des frais de transaction pour un nouveau bail.
Le premier cas est vraiment problématique, car vous achetez en réalité le loyer de marché du local et non pas l’éventuel loyer surévalué. L’exemple classique est le « sales and leaseback » où une grande compagnie vend ses murs à sa propre foncière et se reloue à elle-même le local avec un loyer surévalué. Ce loyer surévalué est fixé grossièrement car il s’agit de toute façon d’un versement intra-entreprises. Si la foncière décide de céder plus tard les murs, l’acquéreur se retrouve seul face à la grande compagnie (par exemple La Poste) qui n’hésitera pas à renégocier un loyer de marché à la baisse une fois les murs cédés à un tiers.
Cette renégociation du loyer à la baisse au renouvellement est un vrai risque puisque le preneur peut, à l’échéance du bail, demander un renouvellement avec un loyer à la baisse, en justifiant ses demandes par des références de loyer dans la zone de chalandise.
Vous devez donc absolument faire une évaluation sur les loyers de marché dans la zone de commercialité immédiate sur des activités équivalentes à celles du preneur.
Pour évaluer le loyer de marché il faut regarder des loyers de référence équivalents selon plusieurs critères :
- commercialité de l’emplacement : les rues doivent être également passantes, avec une disposition équivalente, par exemple local en coin avec un linéaire équivalent
- taille du local : plus le local est grand plus le loyer/m² est faible
- activité équivalente : services, restaurants, mode, etc.
- date de signature : plus le bail est récent meilleure est la référence
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Départ du preneur à chaque échéance triennale
En bail commercial le preneur dispose le plus souvent de la faculté de quitter le local en donnant son congé sans motifs à chaque échéance triennale.
Il est donc important de vérifier que le preneur ne souhaite pas quitter son local pour déménager ailleurs. Le risque est faible si le fonds de commerce a une valeur non négligeable (notamment via le droit au bail) mais ce ne sera pas le cas dans une zone peu commerçante d’un centre-ville moyenne en France, le preneur peut alors décider de déménager et vous vous retrouverez avec un local vide.
On retrouve le risque du dernier point, à savoir un loyer surévalué face à un marché avec des offres moins chères. En plus du risque de dévaluation de loyer, vous risquez également d’avoir une absence de loyer pendant plusieurs mois si le marché est très détendu (voir par exemple cet article sur les commerces vacants à Vierzon) et qu’il est compliqué de trouver un preneur à n’importe quel prix.
Travaux immobiliers d’investissement à prévoir
Le dernier risque lors de l’achat de murs commerciaux est l’éventualité où de gros travaux immobiliers (CAPEX) vous tombent dessus une fois le local acheté.
Même avec un bail net de charges, il est quasiment impossible de faire payer les travaux de mise en conformité au Preneur. Nombreux sont les postes de travaux potentiels qui peuvent grandement dégrader votre rentabilité brute.
Reprenons l’exemple d’un local en province de 1000m² loué 30 000€ par an à La Poste par exemple. Si vous devez effectuer des travaux de désamiantage, des travaux de surélévation suite à des inondations, ou encore des travaux de mise en conformité aux normes handicapés (rampe d’accès + refuge PMR en cas d’incendie), vous pouvez rapidement devoir engager plusieurs années de loyer en travaux.
Ce risque est particulièrement élevé dans les zones où les prix et les loyers au m² sont faibles, car les travaux immobiliers sont proportionnels à la surface et non au loyer. Deux locaux de 1000m² ont dont souvent les mêmes CAPEX alors que les loyers commerciaux sont 10 fois plus faibles à Vierzon qu’à Paris intra-muros.
Nous vous recommandons fortement de consulter les diagnostics, PV d’AG et autres documents techniques vous permettant d’avoir un avis objectif sur les éventuels travaux à prévoir. N’hésitez pas à faire passer un bureau d’études ou un architecte pour évaluer exhaustivement les murs que vous achetez.
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- Mathieu Chantalat, Directeur immobilier
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